Vous n’avez pas encore vu Seuls sont les indomptés, film de David Miller avec Kirk Douglas ? Cette critique ciné est faite pour vous ! Et pour les familiers du film, n’hésitez pas à partager votre ressenti avec nous en ajoutant un commentaire à la fin de cet article !

- Film : Seuls sont les indomptés (Lonely are the brave)
- Réalisateur : David Miller (Etats-Unis)
- Genre : Drame / Western
- Durée : 1h47
- Casting : Kirk Douglas, Walter Matthau, Gena Rowlands, Michael Kane
- Date de sortie : 1962
- IMDb : 7,6/10
- Thématiques : Western / Liberté / Courage / Ouest Américain / Société / Etats-Unis
Qu’a dit la presse de Seuls sont les indomptés ?
Wouah !
Il n’existe pas de plus grand western et certainement pas de plus tragique non plus. (…) Remarquable pour un western à faible budget, “Lonely Are the Brave” interroge sur l’épineuse question de la conception et de la valeur de l’héroïsme.
Bof…
Souvent émouvant et bien servi par ses acteurs et sa photographie, « Lonely Are the Brave » aborde cependant (…) le thème des désaxés avec une nervosité semblable à celle du cheval du cow-boy Kirk Douglas et se contente de rester à la surface plutôt que de traiter le fond de son sujet.
Pourquoi Seuls sont les indomptés vaut le détour ?

Quand on a 60 ans de carrière derrière soi, que l’on a tourné plus de 80 films avec le tout Hollywood, que l’on figure sur la liste des 25 plus grands acteurs américains de tous les temps (dressée par l’American Film Institute), choisir dans sa propre filmographie son film préféré ne doit pas être chose aisée… et c’est cependant sans difficulté que Kirk Douglas répondra à cette question, écartant Les Sentiers de la Gloire, Spartacus ou autre Vie passionnée de Vincent Van Gogh, pour lesquels il avait pourtant été acclamé, pour leur préférer Seuls sont les indomptés, film de David Miller, tourné en 1962 – dont, vous en conviendrez, on entend nettement moins souvent parler… Alors qu’y a-t-il dans ce film pour avoir ainsi fait battre le cœur de Kirk Douglas ?
De quoi parle Seuls sont les indomptés ?
Seuls sont les indomptés de David Miller, c’est un western qui n’en est pas un, avec un cow-boy mais pas d’indiens, au héros solitaire mais qui ne règlera pas ses comptes avec des bandits plus bandits que lui dans l’artère principale déserte d’un bled paumé au cœur de la sécheresse de l’ouest américain… Alors quoi ? Un film, dont les premières images suffisent à elles seules, avec une efficacité foudroyante, à poser l’intrigue : celle de la lutte d’un homme pour un idéal de vie qui n’est déjà plus – un indompté qui, tel un Don Quichotte du Nouveau Mexique, refuse de se conformer à un monde qui change dans lequel les règles sont trop nombreuses et bien souvent artificielles. Des clôtures délimitant nos terres aux papiers qui seuls sauraient justifier de notre identité, Jack Burns, interprété par Kirk Douglas, rejette ce système qui s’impose à lui comme à chaque homme. Il fait le choix de poursuivre, quoi qu’il lui en coûte, son rêve de liberté, dans un rapport à soi, aux autres et à la nature empreint de simplicité et de vérité.

Et c’est fort de cette philosophie de vie qu’il élabore un plan d’évasion pour faire sortir de prison son meilleur ami – perdu de vue de longue date – lorsqu’il apprend qu’il a été incarcéré pour avoir aidé des immigrés mexicains ayant franchi illégalement la frontière. Notre lonesome cowboy est bien décidé à aider son ancien camarade à recouvrer sa liberté, loin de la prison mais loin aussi du monde étriqué dans lequel celui-ci s’est petit à petit enfermé. Le projet n’est évidemment pas sans risque ni aléa et Jack Burns va vite se retrouver avec les autorités aux trousses…

Kirk Douglas trouve avec Seuls sont les indomptés l’un de ses plus beaux rôles et son interprétation est d’une justesse bouleversante jusqu’au saisissant dernier plan de son regard qui vous poursuivra (j’en fais le pari !) longtemps. Soulignons également des dialogues percutants, une tension soutenue, des paysages d’une grande beauté, de la technique aussi avec vols d’hélicoptère dans la sierra (sans doute une première pour l’époque !) et la présence (trop brève certes mais sublime) de Gena Rowlands. Un film qui reste d’une incroyable modernité car, même si les « cow-boys à l’ancienne » ont aujourd’hui disparu, les questions de l’individualité et de la liberté dans le monde qui nous entoure demeurent plus que jamais d’actualité.
Seuls sont les indomptés, en bref :
Pas d’hésitation donc, on regarde plutôt deux fois qu’une ce film atypique, faux western mais vrai drame, mettant en scène la tragique chasse à l’homme du dernier cow-boy par le monde moderne.
La bande-annonce de Seuls sont les indomptés, ça donne quoi ?
Seuls sont les indomptés, des répliques Shebam! Pow! Blop! Wizz!
Jack B. _ A westerner likes open country. That means he’s got to hate fences. And the more fences there are, the more he hates them.
Jerry B. _ I’ve never heard such nonsense in my life.
Jack B. _ It’s true though. Have you ever noticed how many fences there’re getting to be? And the signs they got on them: no hunting, no hiking, no admission, no trespassing, private property, closed area, start moving, go away, get lost, drop dead! Do you know what I mean?

You’d think we’re chasing a ghost – an invisible horse and an invisible cowboy. Harry, throw me that canteen. I haven’t got enough spit left to wet a stick of gum.
OP _You mean to say you got no identification at all?
JB _That’s right.
OP _No draft card, no social security, no discharge? No insurance, no driver’s license, no nothing?
JB _No nothing.
OP _Look, cowboy, you can’t go around with no identification. It’s against the law. How are people going to know who you are?
JB _ I don’t need a card to figure out who I am. I already know.
SMJ _When I tell you to watch that machine of yours, you say, « Machine? Right. » When I give you a message for McNeil, you say, « McNeil? Right. » There’s something about the way you make a question of it and then say « right » that gets on my nerves.
H _Nerves?
SMJ _Right.
Envie d’en savoir plus sur David Miller et Seuls sont les indomptés ?
Itsy-bitsy-teenie-weenie-biographie

Scénariste et réalisateur américain, David Miller est né à Patterson, New Jersey en 1909 et décédé en 1992 à Los Angeles. Malgré une filmographie incroyablement fournie après plus de 40 ans de carrière, Miller ne connaîtra pas d’immenses succès commercial et reste relativement peu connu. Il collaborera à plusieurs reprises avec le scénariste Dalton Trumbo (auteur du roman puis du long-métrage Johnny s’en va-t-en guerre), notamment pour Seuls sont les indomptés. Si l’on en croit Bertrand Tavernier (et nous n’avons aucune raison de ne pas !), parmi ses films les plus notables, on trouve notamment Saturday’s Hero et Le masque arraché.
La genèse de Seuls sont les indomptés
A l’origine, un roman : Seuls sont les indomptés est tiré d’un roman (The brave cowboy) d’Edward Abbey, auteur et militant écologiste américain, né en 1927, amoureux inconditionnel des déserts de l’ouest américain. Notamment connu pour ses romans Désert solitaire (1968) et Le gang de la clef à molette (1975), il s’inscrit dans le courant du nature writing (genre littéraire né aux États-Unis mêlant observation de la nature et considérations autobiographiques) et devient une icône de la contre-culture américaine. Son roman, The brave cowboy, tombe entre les mains de Kirk Douglas qui en achète immédiatement les droits pour l’adapter au cinéma.

Dalton Trumbo et la Liste Noire : Pour l’écriture du scénario, Douglas a recours aux services de Dalton Trumbo (avec lequel il a déjà collaboré à l’occasion du péplum Spartacus). Scénariste reconnu par ses pairs et de nombreuses fois consacré, Trumbo connut néanmoins une carrière tourmentée dès la fin des années 40 alors qu’une chasse aux sorcières est lancée à Hollywood à l’encontre de toute personne suspectée d’être un sympathisant communiste. Refusant de témoigner devant la Commission des Activités Anti-Américaines, Trumbo est condamné à onze mois de prison et placé sur la liste noire de Hollywood aux côtés de nombreuses autres personnalités du cinéma américain. Banni de Hollywood et exilé au Mexique, il ne cessera pourtant pas d’écrire des scénarios pour le cinéma et la télévision, usant de divers pseudonymes ou prête-noms. Véritable pied de nez au Maccarthysme, son travail sera consacré à deux reprises aux Oscars alors qu’il figure toujours sur la liste noire : en 1954 avec Vacances Romaines, pour lequel il utilise le nom de son ami scénariste Ian McLellan Hunter, puis en 1956 avec Les clameurs se sont tues, sous le pseudonyme de Rober Rich. Il lui faudra attendre 1960 et la sortie des films d’Otto Preminger (Exodus) et de Stanley Kubrick (Spartacus – pour ce film, sous l’impulsion de Douglas) pour qu’il voit de nouveau son véritable nom crédité au générique.
The Chairman: _Are you or have you ever been a member of the communist party?
D. Trumbo: _I believe I have the right to be confronted with any evidence which supports this question. I should like to see what you have.
The Chairman: _Oh. Well, you would!
D. Trumbo: _Yes.
The Chairman: _Well, you will, pretty soon.
(…)
D. Trumbo: _This is just the beginning—
The Chairman (pounding gavel): _Just a minute—
D. Trumbo: _Of an American concentration camp.
The Chairman: _This is typical communist tactics. This is typical communist tactics.
Le choix du titre : Passant de « The brave cowboy » à « The last cowboy« , le choix du nom du film s’arrête finalement sur « Lonely are the brave » (Seuls sont les indomptés), titre que Kirk Douglas n’aime pas mais qui lui sera imposé par les studios. Et pour le coup, on dit « merci les studios » car dans ce titre résonne toute la mélancolie, la poésie et la puissance tragique du film.
Plongée dans la filmographie de Kirk Douglas
On se penche sur la filmographie de Kirk Douglas grâce à l’émission radiophonique Plan Large (France Culture) diffusée à l’occasion de la disparition de l’acteur à l’âge de 103 ans en février 2020 : D comme Kirk Douglas, le violent vulnérable. Antoine Guillot et ses invités évoquent le mythe Douglas à la double casquette d’acteur et de producteur.
Kirk Douglas chez les Frenchies
A l’occasion de la sortie en janvier 1989 de son autobiographie, Le fils du chiffonnier, Kirk Douglas est l’invité de Bernard Pivot dans son émission Apostrophes. On y découvre un Kirk Douglas s’exprimant dans un français parfait, plein d’esprit, drôle, humble et fier à la fois et absolument passionnant. De quoi donner envie d’acheter son livre tellement son histoire est digne d’un roman ! Démarrage à la minute 22 de cette vidéo pour la section consacrée à Douglas, pour une trentaine de minutes d’entretien.
David Miller, c’est aussi (notamment !)
- Saturday’s Hero – 1951
- Le masque arraché (Sudden Fear) – 1952
- Piège à minuit (Midnight Lace) – 1960
- Captain Newman M.D. – 1963
- Complot à Dallas (Executive Action) – 1973


Merci de nous avoir fait découvrir ce très beau film ainsi que le parcours du cinéaste. J’ai appris beaucoup de choses .C’est super de voir l’apostrophe consacré à Kirk Douglas.
Avec plaisir ! Oui, j’étais surprise de constater que Kirk Douglas parlait si bien français et il est vraiment passionnant à écouter !