Un film sinon rien… avec Rome la magnifique (Paolo Sorrentino)

Vous n’avez pas encore vu La Grande Bellezza de Paolo Sorrentino ? Cette critique ciné est faite pour vous ! Et pour les familiers du film, n’hésitez pas à partager votre ressenti avec nous en ajoutant un commentaire à la fin de cet article !

Affiche Film La Grande Bellezza Paolo Sorrentino
  • Film : La Grande Bellezza
  • Réalisateur : Paolo Sorrentino (Italie)
  • Genre : Drame
  • Durée : 2h52
  • Casting : Toni Servillo, Carlo Verdone, Isabella Ferrari, Sabrina Ferilli
  • Date de sortie : 05/2013 (France)
  • Distinctions : BAFTA, Golden Globes, Oscars – Catégorie « Meilleur film étranger / Meilleur film non-anglophone »
  • IMDb : 7,8/10
  • Thématiques : Mélancolie / Arts / Jet Set / Rome / Société

Qu’a dit la presse de La Grande Bellezza de Paolo Sorrentino ?

Wouah !

Fellini : son ombre plane sur « La Grande Bellezza » ; non comme modèle à imiter, mais comme source d’inspiration. (…) Sans jamais perdre de son ironie, Paolo Sorrentino passe insensiblement, irrésistiblement, de la démesure à la retenue.

Télérama

Beurk !

Difficile de trouver le moindre éclat dans ce fatras prétentieux narrant la décadence d’un super mondain revenu de tout, tant la complaisance du cinéaste pour sa matière première confisque tout élan de remise en cause, pourtant raison d’être officielle du film.

TéléCinéObs

Pourquoi La Grande Bellezza vaut le détour ?

Photo de Rome - La Grande Bellezza

« Et si on se faisait un week-end à Rome ? » Proposition qui ne sonne pas assez fréquemment à nos oreilles, il faut bien l’avouer, et projet souvent intériorisé mais rarement mis en œuvre par la championne de l’inertie que nous sommes, il faut bien l’avouer aussi… Mais après tout, il existe toujours le cinéma pour nous faire voyager… et puisque c’est Rome l’objet de nos envies, l’évasion est facile car des films tournés dans la ville éternelle, il y en a pléthore. Mais aujourd’hui, notre choix s’arrête sur un long-métrage qui, bien que nommé à neuf reprises au Festival de Cannes 2013, en est reparti bredouille (snif) pour être finalement consacré aux BAFTA, aux Golden Globes et aux Oscars 2014 comme meilleur film étranger/non-anglophone (youpi). Ce film : La Grande Bellezza de Paolo Sorrentino.

De quoi parle La Grande Bellezza de Paolo Sorrentino ?

Image Jep Gambardella - La Grande Bellezza

Un voyage de 172 minutes au cœur de la plus belle ville du monde… et si les quelques premières secondes se déroulent en compagnie d’un groupe de touristes japonais, le reste du périple se fait en témoin privilégié d’une Rome délestée de sa foule, presque secrète, incontestablement féérique. C’est la Rome telle que la connait Jep Gambardella (interprété par le magnifique Toni Servillo – acteur fétiche de Sorrentino ayant notamment campé pour lui Giulio Andreotti dans Il Divo) qui se dévoile au fil des déambulations nocturnes et (presque toujours) solitaires de notre héros, coqueluche de la jet set de 65 ans, journaliste à ses heures et ancien écrivain surfant sur le succès de son seul et unique roman écrit du temps de sa jeunesse. Nous traversons avec lui la Piazza Navona sous un ciel étoilé, arpentons une Via Veneto désertée à l’heure où même les plus fêtards sont rentrés se coucher, flânons à l’aube dans les allées du parc de la Villa Médicis ou sur les bords du Tibre ou longeons le jardin des orangers sur la colline de l’Aventin avant – enfin – de nous prélasser à la douce lumière du matin dans un large hamac sur une terrasse surplombant le Colisée… La Grande Bellezza se trouve à chaque coin de rue, dans chaque cadrage, sur chaque image grâce à une photographie d’un esthétisme absoluangles de vue, lumières, couleurs nous révèlent avec magie toute la beauté de la capitale italienne.

Image La Grande Bellezza, Paolo Sorrentino

Mais le voyage, chers spectateurs, ne s’arrête pas là car, au-delà de la splendeur des vieilles pierres, des palais et des jardins romains, la caméra de Sorrentino nous propose une incursion dans l’univers d’un groupe de (un)happy few aussi futile et décadent que la ville est sacrée et majestueuse. Cet univers, c’est celui de la vie mondaine romaine où les « élites » aristocratiques, artistiques et religieuses se mélangent au fil de soirées aussi folles que nauséeuses. A l’instar de la Dolce Vita de Federico Fellini, incontestable source d’inspiration pour Paolo Sorrentino, La Grande Bellezza dresse le portrait d’un microcosme en perdition pour lequel les jours succèdent aux nuits dans une vacuité que jamais rien ne comble entre vanité, ostentation, férocité et dépravation. Et le ton est lancé avec brio dès les premières minutes du film tandis qu’on assiste à la fête démoniaque organisée à l’occasion des 65 ans de Jep Gambardella… Au son du remix techno entêtant de Bob Sinclar reprenant le tube 70’s de Raffaella Carrà, A far l’amore comincia tu, c’est toute la jet set romaine qui se donne en spectacle, s’observe, se séduit et se juge dans une danse chorégraphiée et enfiévrée.

Image La Grande Bellezza de Paolo Sorrentino - Jep Gambardella

Mais à 65 ans, voilà Jep – qui pourrait être le Marcello de Fellini définitivement remis de ses émotions quelques quarante années après son bain dans la fontaine de Trevi avec la plantureuse Anita Ekberg – désabusé. Qu’ont signifié toutes ces années de légèreté, ce quotidien pailleté et dépourvu de spiritualité ? Le roi de la fête sort de la danse pour faire son autocritique et son regard est amère mais sagace sur la vie qu’il a mené et le monde qui l’entoure. Constat cruel et bien loin de la grande bellezza

La Grande Bellezza, Photo de Ramona

Pourquoi n’a-t-il jamais écrit de second roman ? Cette question, venant d’inconnus comme de ses amis les plus proches, ponctue le film. Entre postures, second degré et vérité intérieure, le temps est venu pour Jep de s’interroger. Et c’est au fil de ses promenades – au cours desquelles il croise des effeuilleuses emmurées dans des cages en verre, une girafe dans la cour des thermes de Caracalla, un mystérieux gardien des clés des palais romains, Fanny Ardant descendant un escalier, un cardinal plus enthousiasmé par la recette du lapin aux olives que par les questions spirituelles de ses brebis égarées, quatre princesses grisonnantes et encostumées tapant le carton dans l’immensité d’un palais abandonné, des flamands roses surplombant le Colisée, une strip-teaseuse à la quarantaine passée flottant sur une bouée colorée ou encore une sainte centenaire au sourire édenté – que Jep Gambardella trouvera sa réponse et pourquoi pas, peut-être, une renaissance.

La Grande Bellezza, en bref :

Avec La Grande Bellezza, Paolo Sorrentino signe un film monumental où la grandeur côtoie le néant et où la magie s’efface devant le vulgaire, laissant le spectateur en apesanteur conscient d’avoir été bercé dans une féérie amère au charme mélancolique d’une puissance rare.

La bande annonce de La Grande Bellezza de Paolo Sorrentino, ça donne quoi ?

La Grande Bellezza, des répliques Shebam! Pow! Blop! Wizz!

S : _Rome est la seule ville au monde où le marxisme est complètement accompli. Tu ne peux pas primer sur les autres plus d’une semaine. On a vite fait de t’envoyer dans l’aurea mediocritas. Rome, c’est le collectivisme pur.
JG : _Le collectivisme pur ? Stefania, en voilà une idiotie ! Sais-tu que Flaubert voulait écrire un roman sur le néant ? S’il t’avait connu, nous aurions eu un grand roman. Quel dommage.

Stefania & Jep Gambardella

Mes amis d’enfance répondaient toujours à cette question de la même manière : La moule.
Mais moi, je répondais : L’odeur des maisons des vieux.
La question était : Quelle est la chose que tu aimes le plus dans la vie ?
J’étais destiné à la sensibilité.
J’étais destiné à devenir écrivain.
J’étais destiné à devenir Jep Gambardella.

Jep Gambardella

V : _Qui est cette femme ?
S : _Tu ne la reconnais pas ? C’est Lorena.
V : _Qui ça ?
S : _Lorena, une ex-starlette de la télé en pleine dégringolade psycho-physique.
V : _Jamais vue. Mais bon, je n’ai jamais eu la télé.
S : _Je sais Viola, tu le répètes tous les jours.

Viola & Stefania
Image film La Grande Bellezza Paolo Sorrentino

JP : _ Dis-moi Stefania… On a couché ensemble toi et moi ?
S : _ Bien sûr que non !
JP : _ C’est une véritable injustice ! Il faut absolument y remédier
S : _ Idiot !
JP : _ Tant mieux… Il nous reste encore quelque chose de beau à faire.

Jep Gambardella & Stefania

Envie d’en savoir plus sur Paolo Sorrentino et La Grande Bellezza ?

Itsy-bitsy-teenie-weenie-biographie

Photo Paolo Sorrentino
@Claudio Porcarelli

Réalisateur, scénariste et écrivain italien, Paolo Sorrentino est né à Naples en 1970. Témoin de la vie italienne, sa filmographie s’intéresse souvent aux mœurs des puissants de son pays. Son premier long métrage (L’uomo in più), réalisé en 2001, reçoit le Ruban d’argent du meilleur nouveau réalisateur, marquant ainsi le début d’une carrière riche en distinctions à l’international (entre autres, Oscar pour La Grande Bellezza / Prix du Jury à Cannes pour Il divo). Sorrentino s’éloigne de l’Italie à deux reprises avec deux longs métrages en langue anglaise : Youth (réunissant notamment Harvey Keitel et Michael Caine) ainsi que l’étrange This must be the place dans lequel il met en scène un Sean Penn fragile et éblouissant en ex-star du rock face à la génialissime Frances McDormand. En 2016, Sorrentino s’essaie avec beaucoup de succès à un genre nouveau en réalisant la série télévisée The Young Pope (suivie en 2019 par The New Pope) dans laquelle Jude Law interprète un jeune pape à contre-courant et controversé.

On écoute Paolo Sorrentino !

Ici, dans un entretien proposé par CinéTFO à la sortie du film. Du choix du titre à la construction du scénario en passant par les références à Fellini, vous saurez tout sur le processus créatif de Sorrentino pour La Grande Bellezza.

https://www.youtube.com/watch?v=Ozh0bmTZcrw

Moment de détente avec le Vidéo Club de Konbini dans lequel on en apprend plus sur l’univers cinématographie de Sorrentino. Il nous parle (évidemment !) de cinéma italien et de ses aînés : Ettore Scola, Antonio Capuano, Federico Fellini – mais aussi de Francis Ford Coppola, Sergio Leone, Wim Wenders, François Truffaut et plein d’autres !

Far l’amore, en musique…

Deux salles, deux ambiances… le film de Sorrentino sur le plan musical ne fera pas mentir ce nouvel adage, nous proposant des moments de douceur entre chants sacrés et musique originale minimaliste du compositeur Lele Marchitelli avant de faire retentir à nos oreilles des tubes techno étourdissants. Petit clin d’œil sonore à la génialissime scène de fête d’anniversaire de Jep, Raffaella Carrà remixée par Bob Sinclar, ça donne, ça !

Paolo Sorrentino, c’est aussi (notamment !)

  • L’homme en plus – Ruban d’argent du meilleur nouveau réalisateur 2002
  • Les conséquences de l’amour – David di Donatello du meilleur film, du meilleur réalisateur et du meilleur scénario 2005
  • Il Divo – Prix du Jury au Festival de Cannes 2008
  • This must be the place – Prix du Jury Œcuménique au Festival de Cannes 2011
  • Youth – Meilleur film et meilleur réalisateur à la 28e Cérémonie des Prix du Cinéma Européen 2015
  • La main de Dieu – Lion d’argent et Grand Prix du Jury à la Mostra de Venise 2021
Affiches Films Paolo Sorrentino Réalisateur Italien
Affiche Film La Grande Bellezza Paolo Sorrentino
S’abonner
Notification pour
guest

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.

0 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Retour en haut
Partager
Partager
0
Envie de partager ? Laissez un commentaire !x