Vous n’avez pas lu Les étoiles s’éteignent à l’aube de Richard Wagamese ? Cette critique littéraire est faite pour vous ! Et pour les familiers du roman, n’hésitez pas à partager votre ressenti avec nous en laissant un commentaire à la fin de cet article !

- Les étoiles s’éteignent à l’aube, Richard Wagamese
- Littérature amérindienne (Canada – Ojibwé) / Littérature XXIe / Littérature Etrangère
- Genre : Roman
- Parution : 2014
- Distinction : Matt Cohen Award décerné à Richard Wagamese pour l’ensemble de son oeuvre par le Writers’ Trust of Canada
- Thématiques : Nature / Voyage / Amérindien / Canada / Enfance/Adolescence / Famille / Quête de Soi / Alcoolisme
Que nous dit la 4e de couv’ de Les étoiles s’éteignent à l’aube ?
Ce roman est un cadeau. En le refermant, on se dit que ce monde n’est pas encore celui de Trump, mais toujours celui de Steinbeck.
Pourquoi Les étoiles s’éteignent à l’aube vaut le détour ?
Des noms qui réveillent l’imaginaire, des coiffes à plumes extraordinaires, des coutumes mystiques, des perdants sublimes, de la fierté, du courage, voici pour résumer ce qui constituait mon émerveillement d’enfant pour les indiens d’Amérique. Bien des années plus tard, il faut bien admettre que la fascination est toujours là, plus éclairée qu’elle ne l’était alors mais tout aussi vive. Car petit ou grand, comment ne pas aborder le destin tragique des nations amérindiennes avec un intérêt proche du sacré ?
De quoi parle le roman Les étoiles s’éteignent à l’aube ?

Nous voici en Colombie Britannique dans la seconde moitié du XXe siècle, où les terres des autochtones ont depuis longtemps fait l’objet d’appropriations forcées par les colons européens et où le mode de vie occidental s’est imposé de force sur le territoire, bouleversant sur plusieurs générations des hommes, des femmes, des enfants, des nations entières dans leurs traditions ancestrales et leur rapport au monde.
Le jeune Franklin Starlight, 16 ans seulement et pourtant presque déjà un homme, est un sang-mêlé d’origine ojibwé. Il a grandi dans une ferme en pleine nature aux côtés d’un vieil homme, un blanc, faute de parents pour s’occuper de lui. Sa famille de sang se résume à un père, indien d’origine, qu’il ne connaît que de loin, perdu depuis de longues années dans les noirceurs de la ville entre alcool et prostituées. Voilà pourtant qu’à l’article de la mort, ce père absent se manifeste le priant de le conduire dans son dernier voyage, au cœur des montagnes, là où reposent les guerriers.

Débute alors pour le père et son fils un long périple dans les grands espaces canadiens entre montagnes, rivières et forêts. Un monde qui n’existe plus que pour une poignée d’hommes qui n’a pas cédé aux appels de la modernité. Un monde que le père a délaissé mais que le garçon a appris à connaître et à chérir au travers des enseignements du vieil homme, lequel lui a transmis avec sagesse et simplicité sa philosophie de vie : le respect du vivant, homme, faune ou flore indifféremment. Ce dernier voyage, pour ce père qui se meurt, sera l’occasion pour lui de découvrir un fils s’étant, sans en avoir une conscience éveillée, rapproché de sa culture d’origine, devenant un homme solide, honnête et droit dans la lignée des guerriers ojibwés. Il permettra également au père de revenir sur son passé et de partager enfin son histoire, dévoilant à son fils et au lecteur toute la complexité de l’intégration des amérindiens au monde moderne.
Les étoiles s’éteignent à l’aube, en bref :
Un voyage initiatique, un roman sur la transmission, une merveilleuse ode à la nature qui donne des envies de voyage et de grands espaces et nous invite à repenser notre rapport au monde, ce qui se rapproche sans doute le plus du bonheur se trouvant à portée de main pour qui prend le temps de regarder, de sentir et de ressentir.
Un court extrait de Les étoiles s’éteignent à l’aube pour se faire une idée
Ils prenaient les chevaux, traversaient le champ, remontaient pesamment jusqu’à la crête et quand ils étaient arrivés de l’autre côté, ces terres devenaient ce que le vieil homme appelait « le vrai monde ». Pour le garçon, le vrai monde c’était un espace de liberté calme et ouvert, avant qu’il apprenne à l’appeler prévisible et reconnaissable. Pour lui, c’était oublier écoles, règles, distractions et être capable de se concentrer, d’apprendre et de voir. Dire qu’il l’aimait, c’était alors un mot qui le dépassait, mais il finit par en éprouver la sensation. C’était ouvrir les yeux sur un petit matin brumeux d’été pour voir le soleil comme une tâche orange pâle au-dessus de la dentelure des arbres et avoir le goût d’une pluie imminente dans la bouche, sentir l’odeur du Camp Coffee, des cordes, de la poudre et des chevaux. C’était sentir la terre sous son dos quand il dormait et cette chaleureuse promesse humide qui s’élevait de tout. C’était sentir tes poils se hérisser lentement à l’arrière de ton cou quand un ours se trouvait à quelques mètres dans les bois et avoir un noeud dans la gorge quand un aigle fusait soudain d’un arbre. C’était aussi la sensation de l’eau qui jaillit d’une source de montagne. Aspergée sur ton visage comme un éclair glacé. Le vieil homme lui avait fait découvrir tout cela.
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Richard Wagamese (1955 – 2017) est un romancier et journaliste autochtone canadien, appartenant à la nation amérindienne ojibwé. De parents alcooliques, il grandit dans des foyers d’accueil loin de sa famille et de ses origines et connaît une enfance et adolescence difficiles. Déraciné, son insertion en tant qu’amérindien dans un monde de blancs s’avérera compliquée, allant de petits boulots en petits boulots, passant même par la case prison. Ce n’est que vers l’âge de 25 ans qu’il retrouvera la culture de ses origines, un retour aux sources qui lui inspirera l’écriture de son premier roman, The Keeper n’ me (prix du meilleur roman en 1995 décerné par la Writers’ Guild of Alberta). Auteur de plus d’une dizaine de romans et essais (dont on peut déplorer que seuls trois à date soient traduits en français !), son œuvre s’intéresse à la question identitaire et témoigne de la condition des autochtones au Canada. Au fil des années, il recevra de nombreuses distinctions littéraires et journalistiques au Canada. Starlight, son dernier roman, sera publié à titre posthume.
On écoute Richard Wagamese
Prenez le temps d’écouter Richard Wagamese évoquer ce que représente pour lui la littérature et sa manière d’aborder l’écriture dans ce discours adressé en 2015 au Writers’ Trust of Canada alors qu’il est honoré du Matt Cohen Award, prix récompensant chaque année un auteur canadien pour l’ensemble de son œuvre.
Richard Wagamese, c’est aussi (notamment !)
- Jeu blanc – 2017
- Starlight – 2019

