Vous n’avez pas encore lu Tous les matins je me lève de Jean-Paul Dubois ? Cette critique littéraire est faite pour vous ! Et pour les familiers du roman, n’hésitez pas à partager votre ressenti avec nous en ajoutant un commentaire à la fin de cet article !

- Tous les matins je me lève, Jean-Paul Dubois
- Littérature Française / Littérature XXIe
- Genre : Roman
- Parution : 1988
- Thématiques : Tranche de Vie / Introspection / Humour / Famille
Que nous dit la 4e de couv’ de Tous les matins je me lève ?
Jean-Paul Dubois possède comme personne dans notre univers littéraire hexagonal l’art de mêler humour et désespoir.
Pourquoi Tous les matins je me lève de Jean-Paul Dubois vaut le détour ?
Tous les matins, il se lève. Et moi aussi. Il n’en fallait pas plus pour me dire que ce livre allait me parler – telle était en tout cas mon intime conviction alors que je me tenais face à l’étagère allant du sol au plafond, chargée des auteurs français de A à F, de la jolie petite librairie de mon quartier. Et 212 pages plus tard, confirmation. Ce “tous les matins je me lève”, je le comprends, il me ressemble, et si j’avais cherché à exprimer le ressenti du moment je n’aurais pas trouvé mieux.
De quoi parle Tous les matins je me lève ?

(crédit : Xavier de Fenoyl)
Et pourtant, Paul Ackerman, notre héros – si l’on peut dire-, se lève à 12h (pas comme moi), se couche rarement avant 3h du matin (pas comme moi) et passe ses nuits à écrire des romans, à conduire le long de la côte méditerranéenne dans sa Triumph décapotable bleue marine ou à rêver à une pulvérisation du XV de la Rose dans un match où, sélectionné d’un jour, il se révélerait déterminant, époustouflant son entraîneur et ses coéquipiers et embrasant le public avec sa fougue exceptionnelle et un talent jamais égalé dans l’histoire du sport (là encore rien à voir avec moi… la nuit, je dors, et si je rêve ce n’est jamais de rugby et rarement pour accomplir un quelconque exploit et encore moins sportif).
Dans la journée, Paul Ackerman glandouille (sauf au printemps où fleurit en lui une envie irrépressible de bricolage niveau compétition). Il rend visite (ou pas) à son éditeur, retrouve de temps en temps un copain, fomente de terribles vengeances à l’encontre d’un critique littéraire, est le témoin attentif – parfois distancié mais au fond aimant et sensible – du quotidien de sa femme et de ses enfants. Il boit du lait, beaucoup et en toute occasion. Il emprunte, encore et toujours, la route du bord de mer car ce plaisir là se vit de nuit comme de jour au volant de son anglaise qu’il aime comme on aime une femme. Là encore, ce qui pourrait nous rapprocher sur le papier de Paul Ackerman est bien mince… cependant, tous les matins, quoi qu’il arrive, nous nous levons… et cette formule qui semble n’être rien se révèle d’une profondeur vertigineuse – la vie en cette phrase résumée, soit la poursuite d’un chemin, jusqu’à notre dernier souffle, du mieux qu’on peut et sans gloriole à la clé.
Tous les matins je me lève, en bref :
Dans ce roman génial, Jean-Paul Dubois dresse le portrait d’un homme qui avance dans la vie comme il peut, composant avec ses forces et ses faiblesses, s’efforçant de rester fidèle à ce qu’il est même si cela signifie être incompris parfois et seul aussi souvent. A la manière d’un John Fante, Dubois capture avec une finesse et une intelligence infinies l’âme humaine, l’exposant dans tout ce qu’elle a de fragile, de sensible, d’idiot et de magnifique à la fois.
Alors, puisqu’il faudra bien se lever demain matin, profitez-en pour faire un tour en librairie et revenez avec ce merveilleux roman dans votre poche. Vous ne le regretterez pas !
Quelques courts extraits de Tous les matins je me lève pour se faire une idée

J’avais la femme la plus extraordinaire du monde dans la voiture la plus fantastique de la terre. J’ai mis le contact et démarré avec une infinie douceur. Le six cylindres a murmuré quelque chose de tendre. Il n’était pas question de rugir, il y avait une dame assise sur les coussins. On a pris la route de la côte et roulé une bonne heure. Les cheveux d’Anna s’emmêlaient comme des spaghettis, le vent chantait dans mes oreilles, la nuit descendait doucement. Dans quelques instants, j’allumerais les veilleuses et les cadrans éclaireraient le visage de ma passagère. Ils lui feraient un maquillage de brume et le reflet des aiguilles danserait au fond de ses yeux. Par moments, je lui caressais l’épaule. Le soleil avait plongé dans l’eau et le ciel devenait rose comme de la pâte d’amande. L’océan avait les lèvres blanches. J’ai dit à Anna : « On roule dans une étoile filante. »
Quand je suis arrivé à la maison, Anna était au bord de la piscine. Nous faisions une sacrée paire de fainéants, elle et moi. Quand nous nous étions connus, on s’était juré de bien vivre en en faisant le moins possible. Depuis vingt ans, nous n’avions pas trahi notre serment.
Ce qu’il avait écrit sur le livre de Thomas était vraiment dégueulasse. J’étais fou de rage. C’était d’ailleurs là une des particularités de l’amitié qui nous liait, Thomas et moi. On se communiquait spontanément nos colères par une sorte de contamination fulgurante. Une telle solidarité dans la haine avait quelque chose d’étonnant. Il suffisait qu’il dise deux ou trois choses désagréables à propos d’un type dont j’ignorais tout pour que, dans l’instant, ce gars-là devienne mon ennemi personnel.
Envie d’en savoir plus sur Jean-Paul Dubois ?
Itsy-bitsy-teenie-weenie-biographie

Jean-Paul Dubois est né à Toulouse en 1950. Tous les matins je me lève est l’un de ses premiers romans, publié alors qu’il a 38 ans. Avant de se consacrer à plein temps à la littérature, il travaille en tant que journaliste au service des sports du quotidien Sud Ouest puis devient grand reporter au Nouvel Observateur, magazine pour lequel il arpente les Etats-Unis douze années durant et se fait le témoin des délires et paradoxes de la société américaine. Ses chroniques américaines se trouvent aujourd’hui réunies dans deux recueils : L’Amérique m’inquiète et autres récits et Jusque-là tout allait bien en Amérique. Il est l’auteur de plus d’une vingtaine de romans.
Jean-Paul Dubois nous dit tout
Dans son émission Affaires Culturelles diffusée sur France Culture, Arnaud Laporte nous offre un merveilleux entretien de 60 minutes avec Jean-Paul Dubois (2021). L’auteur y évoque en toute simplicité son enfance, son amour pour la musique, son processus d’écriture et son œuvre.
Et pour les plus pressés, voici un court entretien mené pour France Inter par Léa Salamé à l’occasion de la remise du Prix Goncourt 2019 à Jean-Paul Dubois pour son roman Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon, entretien qui se clôture par quelques mots concernant notre roman du jour !
Jean-Paul Dubois, c’est aussi (notamment !)
- Parfois, je ris tout seul – 1992
- Kennedy et moi – Prix France Télévisions 1996
- Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon – Prix Goncourt 2019
- Une vie française – Prix Femina et Prix du roman Fnac 2004
- Vous plaisantez, Monsieur Tanner – 2006
- Le cas Sneijder – Prix Alexandre-Vialatte 2012


Quand en lisant UNE VIE FRANCAISE, je suis tombé sur: « La vie n’est rien d’autre que ce filament illusoire qui nous relie aux autres et nous donne à croire que le temps d’une existence que nous pensons essentielle, nous sommes simplement quelque chose plutôt que rien », j’ai su que lui et moi étions reliés par un filament illusoire et essentiel <3
Merci pour cette bien jolie citation. J’ai beaucoup aimé Une vie française. C’est d’ailleurs avec ce roman que j’ai découvert Jean-Paul Dubois. J’en suis depuis à mon 7e !