Vous n’avez pas encore vu De l’autre côté de l’espoir d‘Aki Kaurismäki ? Cette critique ciné est faite pour vous ! Et pour les familiers du film, n’hésitez pas à partager votre ressenti avec nous en ajoutant un commentaire à la fin de cet article !

- Film : L’autre côté de l’espoir
- Réalisateur : Aki Kaurismäki (Finlande)
- Genre : Comédie Dramatique
- Durée : 1h40
- Casting : Sakari Kuosmanen, Sherwan Haji
- Date de sortie : 2017
- IMDb : 7,2/10
- Thématiques : Migrants / Quête de Soi / Solitude / Fraternité / Humour / Société
Qu’a dit la presse de L’autre côté de l’espoir d’Aki Kaurismäki ?
Wouah !
Voilà, Aki Kaurismäki est à son meilleur, et livre un nouveau chef-d’œuvre, dans la lignée de ses plus grandes réussites, « la Fille aux allumettes », « Au loin s’en vont les nuages ».
Bof…
On le dira naïf, partisan, candide mais, sans jamais être ni démago ni manipulateur, Kaurismäki fait plus que nous inviter au rêve et à l’utopie. Il nous y incite.
Pourquoi L’autre côté de l’espoir d’Aki Kaurismäki vaut le détour ?

L’autre côté de l’espoir, voilà un titre de film qui en soi interpelle car si j’en juge par le fil de mes échanges, entre : la factrice, les amis, la famille, sans oublier mon for intérieur – un grand nombre d’entre nous passe ses journées à “espérer”… que la journée sera bonne, que les vacances se passeront bien, que ce film que nous avons choisi tiendra toutes ses promesses, que ce garçon finira par nous dire je t’aime, que ça va aller tout simplement… Mais une fois ce message d’espoir lancé, quoi ? On laisse souvent les clés au hasard. Il n’y a plus qu’à croiser les doigts, le grand manitou des bonnes espérances devrait prendre le relais, notre bonne étoile va s’occuper de tout. Mais figurez-vous qu’il n’en est pas ainsi pour tout le monde. Certains d’entre nous (et peut-être vous !) en ont fini avec l’espoir et, bien loin de désespérer, ont passé la cinquième. Avec leurs petits moyens, ils prennent leur destin en main.
De quoi parle L’autre côté de l’espoir ?

C’est sur ce sujet passionnant que s’attarde le réalisateur finlandais Aki Kaurismäki dans L’autre côté de l’espoir en nous faisant suivre le parcours de deux gars qui, bien que ne payant pas de mine, ont développé un talent merveilleux : celui de ne pas concilier avec les incidents de la vie et d’avancer quoi qu’il en coûte vers l’idéal qu’ils se sont fixés pour eux-mêmes. Le premier, Khaled, jeune réfugié Syrien bastonné par la vie, a rejoint Helsinki après une longue et difficile itinérance. L’autre, Wikhström, finlandais middle class à la cinquantaine bedonnante et triste, est représentant de commerce dans le monde amidonné des chemises pour homme. Nous sommes face à deux hommes seuls, bien loin d’avoir la flamboyance de super-héros missionnés pour changer le Monde, et qui pourtant sont bien déterminés à changer le leur. Alors, présenté comme ça, on pourrait craindre le mélo à gogo mais nous ne sommes pas ici à Hollywood et c’est tant mieux. On enlève tout ce qui brille, les bisounours, les rondeurs et les violons pour faire face à une réalité abrupte, difficile et mal foutue challengée sans esbroufe ni folie des grandeurs par deux invisibles.

Mais au-delà de la pertinence de son sujet, le génie de ce film réside dans le talent de réalisation de Kaurismäki et ce n’est pas un hasard s’il remporte pour ce long-métrage, en 2017, l’Ours d’argent du meilleur réalisateur au festival de Berlin – à l’image de cette mise en place percutante – un homme qui arrive, un autre qui s’en va – pas un mot n’est prononcé mais tout est dit et l’on retient son souffle durant les 90 minutes qui suivent, curieux des chemins qu’emprunteront nos deux protagonistes et charmés par le style de Kaurismäki. Son dispositif fonctionne à l’économie avec une efficacité redoutable, parvenant en une fraction de seconde et sans artifices à nous serrer le cœur puis à nous faire s’esclaffer – désamorçant par le burlesque le dramatique des situations. Tout est minimaliste, de la caméra (abonnée ou presque aux plan fixes), aux décors (que dire de ce poster de Jimi Hendrix comme unique élément de déco d’un restaurant qui n’a vraiment rien de rock and roll ?!), en passant par le jeu des acteurs et les dialogues (les mots ne sont pas légion mais font mouche entre vérité brute et second degré).

“Suis-je le dernier de mon espèce ?” s’interroge Wikhström. Il faut croire que non car sur leurs chemins respectifs ils croiseront de temps à autres des hommes et femmes qui, comme eux, n’ont pas renoncé à leur part d’humanité. Des hommes et des femmes qui eux aussi sont passés de l’autre côté de l’espoir et ce faisant changent des vies, la leur, celle des autres et, sans pour autant avoir cette prétention – finalement – le Monde avec un grand M un peu aussi.
L’autre côté de l’espoir, en bref :
Vous l’aurez compris, L’autre côté de l’espoir d’Aki Kaurismäki est un film humaniste aussi original qu’inspirant et je SAIS (puisque je me suis jurée de ne plus espérer !) que vous prendrez le temps de le découvrir car il n’existe aucune bonne raison de s’en priver !
La bande-annonce de L’autre côté de l’espoir, ça donne quoi ?
L’autre côté de l’espoir, des répliques Shebam! Pow! Blop! Wizz!
C _ On pourrait éteindre le frigo mais il ne tient pas, même de biais.
W _ Il ne peut pas habiter ici. J’ai besoin de ma tranquilité. Suis-je un caprice de la nature sans besoin d’intimité ? Est-ce que je ne saigne pas quand on m’empoisonne et que je meurs ? Suis-je le moindre des moindres ?
C _ Et moi, que suis-je alors puisque vous êtes le patron ?
W _ Au moins, tu connais ta place.
C _ Mon neveu est un génie.
W _ Ca doit être héréditaire

W _ Je vais changer de domaine. Tu veux acheter mon stock ? Je te vends 3000 chemises à moitié prix.
_ C’est pas possible. J’arrête à Noël. Je vais m’installer à Mexico. Je boirai du saké en dansant le hula. J’ai besoin d’animation après toute cette tranquilité et ce silence.
K _ Tu sembles joyeux et content.
M _ Je fais semblant. Parce qu’on renvoie dans ce pays en priorité les mélancoliques.
(…)
K _ A ton avis, je devrais commencer à faire semblant de sourire ?
M _ Oui, bien sûr, ça aide. Mais souris pas dans la rue, t’aurais l’air fou et t’aurais des problèmes.
K _ Tu me troubles. Je souris ou je pleure ?
M _ Tu comprendras plus tard.
Envie d’en savoir plus sur Aki Kaurismäki et L’autre côté de l’espoir ?
Itsy-bitsy-teenie-weenie-biographie

Aki Kaurismäki, scénariste, réalisateur et producteur naît en 1957 à Orimattila en Finlande. Recalé à l’entrée de école de cinéma, il apprend le métier aux côtés de son frère Mika Kaurismäki, lui-même réalisateur et scénariste avant de poursuivre sa carrière en solo. Admirateur du cinéma de la Nouvelle Vague (on retrouve d’ailleurs Jean-Pierre Léaud dans trois de ses films), il propose un cinéma d’auteur au rythme lent et aux dialogues minimalistes (se rapprochant à certains égards de celui de Jim Jarmusch, auquel il donnera d’ailleurs un petit rôle dans son film Leningrad cowboys go America). Kaurismäki met en scène des personnages en marge de la société et souvent en quête d’identité dans des comédies mélancoliques à forte empreinte sociale et à l’humour grinçant. Auteur de plus d’une vingtaine de films, il a notamment réalisé deux trilogies : une trilogie du prolétariat comprenant Shadows in paradise, Ariel, La fille aux allumettes et une trilogie axée sur la Finlande avec Au loin s’en vont les nuages, L’homme sans passé, Les lumières du faubourg. Avec L’autre côté de l’espoir et Le Havre, tourné en France, il s’intéresse au sort des migrants. Le réalisateur remportera le Grand Prix au Festival de Cannes 2002 pour L’homme sans passé, offrant avec ce même film le prix d’interprétation féminine à l’une de ses actrices fétiches Kati Outinen.
Des interviews à gogo
Rien de mieux que cet entretien express de 2012 pour mieux comprendre ce qui anime Aki Kaurismäki (avec, en prime, une version en finnois du tube des Chats Sauvages, Twist à St Topez… oui, ça existe…)
Prenons neuf petites minutes pour écouter les deux acteurs principaux nous parler du film !
Et si vous en voulez encore, prenez le temps d’écouter les 35 premières minutes d’On aura tout vu, le magazine cinéma de France Inter animé par Christine Masson qui, à l’occasion de la sortie de L’autre côté de l’espoir en 2017, revient sur l’univers d’Aki Kaurismäki et sa filmographie en compagnie du réalisateur et de l’acteur André Wilms.
Et pourquoi pas un peu de musique ?
L’autre côté de l’espoir d’Aki Kaurismäki, c’est aussi l’occasion de découvrir du blues finlandais et c’est vachement bien ! Ici le groupe Dumari & Spuget interprétant Skulla Tai Delaa !
La musique jouant un rôle important dans le cinéma de Kaurismäki, l’émission Blow-up diffusée sur Arte a consacré en 2016 un de ses épisodes au réalisateur avec un Top 5 des meilleurs scènes musicales dans sa cinématographie (et si nous n’y retrouvons pas De l’autre côté de l’espoir, c’est uniquement parce que notre film ne verra le jour que quelques années plus tard !)
Aki Kaurismäki, c’est aussi (notamment !)
- Ariel – 1988
- J’ai engagé un tueur – 1990
- La fille aux allumettes – 1990
- Au loin s’en vont les nuages – 1996
- L’Homme sans passé – 2002 (Grand Prix et Prix d’interprétation féminine pour Kati Outinen au Festival de Cannes)
- Le Havre – 2011 (Prix Louis Delluc)

